L'Île d'Hispaniola : Haïti et la république Dominicaine.
Les séismes catastrophiques sur Hispaniola.
L'île d'Hispaniola, bordée au Nord et à l'Est par une fosse de convergence de 8,000 mètres de profondeur, se situe sur l'arc insulaire de Haïti, - aux volcans majoritairement en sommeil depuis environ 1,5 Millions d'années -, à la frontière des plaques lithosphériques transformantes Nord-américaine subductant, à la vitesse de 1,1 centimètres par an, aux Petites Antilles, - Martinique, Guadeloupe..., Îles du Vent et Îles sous le vent -, et décrochant au niveau des Grandes Antilles, - Cuba, Hispaniola, Jamaïque et Porto Rico -, et des Caraïbes. Ces plaques se déplacent ensemble vers l'Ouest-Nord-Ouest, la plaque Nord-américaine de 2,5 centimètres/an et la plaque des Caraïbes de seulement 0,5 centimètres/an. De ce fait, avec une amplitude décrochante de 2 centimètres/an, l'île d'Haïti-Saint Domingue se trouve dans une région dite « transformante » senestre(2).
Mouvements absolus des plaques tectoniques dans la région d'Hispaniola. En noir, déplacement vers l'Ouest-Nord-Ouest des plaques Nord-américaine et des Caraïbes. En rouge, encadrant les îles de la Jamaïque, d'Hispaniola et de Porto Rico, la région « transformante » senestre. En gris, la zone de subduction. En rose, les failles, au Nord, de la Tortue, et, au Sud, d'Enriquillo.
En outre les déplacements des deux plaques lithosphériques entraînent des déplacements coulissants sur les failles qui zèbrent l'Île d'Hispaniola et, inexorablement, créent des mouvements sismiques. Deux failles actives sont nettement identifiées sur l'île d'Haïti/Saint Domingue, l'une, de subduction, de direction Est-Ouest, dite du Canal de la Tortue, de fort dynamisme, responsable de la majorité des secousses sismiques se produisant dans la partie îlienne septentrionale, au large de la côte Nord du territoire haïtien(3), la longeant et pénétrant, se prolongeant, au milieu des terres, dans la vallée du Cibao, en République Dominicaine ; la seconde, de décrochement, dite faille d'Hispaniola ou d'Enriquillo, à l'intérieur des terres, à travers la presqu'île méridionale haïtienne, au jeu sénestre de direction Est-Nord-Est, d'une longueur approximative de 280 kilomètres, courant depuis Tiburon jusqu'à Pétionville, dans la banlieue de Port au Prince, et se prolongeant, en République Dominicaine, par Jimani, dans la Vallée d'Enriquillo.
La faille d'Enriquillo, au plan sismique, est très active. Elle a contribué à la surrection des deux chaînes montagneuses qui parcourent toute la presqu'île sud, le massif de la Hotte, atteignant 2.347 mètres au Pic de Macaya, et celui de la Selle culminant, au Morne, - ou Pic de la Selle -, à 2.680 mètres, et de l'escarpement sur lequel est bâtie une grande partie de la ville de la capitale haïtienne, Port au Prince, et toute sa banlieue Sud. Cette faille est la cause principale de la majorité des séismes enregistrés dans le sud îlien de l'île d'Hispaniola, tant sur le territoire de Haïti, - Presqu'île Sud de Haïti et région métropolitaine de Port au Prince -, que sur celui de Saint Domingue, - région du lac d'Enriquillo et celle, métropolitaine, de San Domingo -. En outre, Port-au-Prince et ses environs, - Turgeau, Bourdon, Delmas, Fragneau, Musseau, Pétionville... -, sont vulnérables aux séismes par le fait que ces villes sont traversées par un réseau de failles secondaires parallèles ou perpendiculaires à la faille principale active d'Enriquillo.
Ces deux failles principales, - la plaque tectonique des Caraïbes se trouvant compressé entre 5 masses lithosphériques, les plaques Nord et Sud-américaine, des Andes du Nord, de Panama et Cocos -, ont la particularité de résister aux contraintes colossales imposées par les mouvements des plaques Nord-américaine et des Caraïbes. Aussi leurs segments accumulent, durant plusieurs dizaines ou centaines d'années, l'énergie produite par l'intensité des frictions exercées et se relâchent brutalement lors des tremblements de terre toujours suivis de centaines ou de milliers de répliques, sur une très courte durée, de plus ou moins forte magnitude. Lors, quand se produit un séisme, il est toujours de magnitude égale ou supérieure à 7/7,5 sur l'échelle ouverte de Richter et d'intensité IX à XI sur l'échelle MSK(4), et, si l'épicentre de celui-ci se situe en milieu marin, il provoque un tsunami. Les secousses telluriques cessant, une période d'accalmie débute et les compartiments des failles engorgent une nouvelle concentration d'énergie qui ne se libérera qu'avec une nouvelle brusque période d'activité entraînant une rupture sismique et le relâchement des contraintes tectoniques.
Les séismes catastrophiques sur Hispaniola.
Depuis l'an de sa découverte, en 1492, par Christophe Colomb, un grand nombre de séismes catastrophiques ont gravement affecté l'île d'Hispaniola :
Le 2 décembre 1562 : Les villes de Santiago et de La Vega sont détruites et la ville de Puerto Plata subit des dégâts majeurs : Magnitude estimée de 7 à 7,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à IX sur l'échelle MSK.
Le 8 septembre 1615 : Toute l'île est touchée et subit des dégâts majeurs. La ville de San Domingo est ravagée. Les répliques, terribles, durent quarante jours : Magnitude estimée de 8 à 8,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à XI sur l'échelle MSK..
Le 9 mai 1673 : entre 6 et 7 heures du matin, la ville de San Domingo, le couvent Santa Clara et la majeure partie des maisons sont détruites : Magnitude estimée de 7,5 à 8 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à X sur l'échelle MSK.
En 1684 : Bien peu d'informations récoltées sur ce séisme si ce n'est qu'il fut de forte magnitude sur l'échelle de Richter, estimée à 8/8,5, et d'intensité estimée à XI sur l'échelle MSK.
En 1691 : Idem pour ce séisme, les seuls documents existants ne faisant état que d'une très forte intensité, estimée à IX sur l'échelle MSK.
Le 18 octobre 1751 : à 15 et 17 H : Les villes d'Azua et de Port au Prince sont détruites. Tout l'Ouest et le Sud de l'île d'Hispaniola est touché, de plus, par un tsunami : Magnitude de 8 à 8,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité X sur l'échelle MSK.
Le 21 novembre 1761 : L'épicentre se serait situé entre Jimani et San Juan, en République Dominicaine, et des documents précisent que les arbres et les pieds de maïs avaient été déracinés, que la terre s'était ouverte et que de nombreux animaux avaient disparu dans les entrailles de la terre ... Intensité IX sur l'échelle MSK.
En 1771 : La ville de Port au Prince est aux trois quarts détruite. Tout le Sud de l'île d'Hispaniola est touché : Magnitude estimée à 8 à 8,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à X sur l'échelle MSK.
Du 7 mai au 10 Mai 1842 : Épicentre se situant entre San Juan et San Domingo. Une véritable catastrophe ruine la quasi totalité de l'île d'Hispaniola. 50.000 à 60.000 morts en Haïti et au moins autant en République Dominicaine. La ville de Santiago est détruite et celle du Cap Haïtien, 5.000 morts sur les 10.000 habitants, de même. De nombreux immeubles s'effondrent à San Domingo. Le palais de Sans Souci et la Citadelle Laferrière ont été endommagés à Milot. Un tsunami ravage les côtes du nord et des vagues de plus de 5 mètres de haut ont été enregistrées à Port de Paix et à Port au Prince. Des documents précisent : « la terre s'ouvre et se ferme avalant un grand nombre de personnes. » : Magnitude 8 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à IX sur l'échelle MSK.
En 1887 : dans le nord d'Haïti avec des dégâts majeurs à Port de Paix et Cap Haïtien : Magnitude 7,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à IX sur l'échelle MSK
Le 29 décembre 1897 : à 6 h 32 du matin. La ville de Santiago, République Dominicaine, est partiellement détruite : Magnitude de 7 à 7,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité IX sur l'échelle MSK.
En 1904 : Dans le nord du pays avec dégâts majeurs à Port de Paix et Cap Haïtien : Magnitude 8 sur l'échelle de Richter avec une intensité estimée à X sur l'échelle MSK.
Le 6 octobre 1911 : La ville de San Juan est très endommagée : Magnitude de 7 à 7,5 sur l'échelle de Richter avec une intensité IX sur l'échelle MSK.
Le 4 août 1946, à 13 heures : Séisme enregistré à Cuba, à Puerto Rico... Ressenti dans toutes les Îles des Grandes et des Petites Antilles, sur les Côtes Sud des États Unis, les côtes Nord de l'Amérique du Sud, et dans toute l'Amérique centrale, - Mexique, Guatemala, Nicaragua Honduras, Panama... -, Nombreux dégâts sur les bâtiments et un tsunami détruit la ville de Matanzas et provoquant de gros dégâts à Nagua : Magnitude de 8,1 sur l'échelle de Richter avec une intensité IX sur l'échelle MSK.
A suivre : Les raisons du séisme en Haïti : 3/3 l'île d'Hispaniola et le volcanisme.. Raymond Matabosch
(2) Région « transformante » : A la limite de plaque transformantes, les plaques glissent l'une contre l'autre. La faille de San Andréas, en Californie, est un exemple de limite de plaque transformante, où la plaque Pacifique glisse le long de la plaque Nord Américaine.
Senestre, ou sénestre, est un terme en vieux français, du latin « sinister », signifiant gauche, par opposition à dextre.
(3) Faille Nord dite aussi faille du Canal de la Tortue : Cette faille active passe entre l'Île d'Hispaniola et l'île de la Tortue. Bien qu'à sa proximité immédiate de l'île d'Hispaniola, l'île de La Tortue fait partie d'un bloc tectonique distinct, du reste d'Hispaniola.
(4) L'échelle de Richter ou échelle ouverte de Richter : L'échelle de Richter permet de mesure l'énergie libérée lors d'un séisme. Plus la magnitude est élevée, plus le séisme a libéré d'énergie. Il s'agit d'une échelle logarithmique, c'est-à-dire qu'un accroissement de magnitude de 1 correspond à une multiplication par 30 de l'énergie et par 10 de l'amplitude du mouvement.
L'échelle de Medvedev-Sponheuer-Karnik, aussi appelée échelle MSK, est une échelle de mesure de l'intensité d'un tremblement de terre. Elle décrit les effets d'un tremblement de terre en termes de destructions des installations humaines et de modifications de l'aspect du terrain, mais également en termes d'effets psychologiques sur la population, - sentiment de peur, de panique, panique généralisée -. Cette évaluation qualitative très utile ne représente en aucun cas une mesure d'un quelconque paramètre physique des vibrations du sol .
Courtoisie: Haiti-Connexion-Culture
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Tremblement de terre du 12 Janvier 2010: pourquoi a-t-il été aussi catastrophique?
Par Michel Legagneur
Beaucoup de gens ne savaient pas qu' Haiti est vulnérable aux tremblements de terre. Entre l'année 1751 et l'année 1904 plusieurs séismes plutôt majeurs ont été enregistrés parmi lesquels ceux de 1751 et 1771 qui détrusirent Port-au-Prince, ses environs et d'autres régions du pays; celui de 1842 qui ruina presque toute l'ile (particulierement Cap-Haitien et Port de Paix) et causa la mort de plus de 60,000 Haitiens; celui de 1904 qui fit des dégats considérables dans le Nord etc…Apparemment rien de majeur ne s'est produit depuis et ce calme devrait être un signe plutôt inquiétant.
En effet, l'énergie énorme accumulée depuis1904 résulta dans le séisme du 12 Janvier 2010. D'une magnitude de 7.0 (sur l'échelle de Richter) et suivi de nombreuses répliques heureusement moins puissantes, il ruptura un segment (d'une longueur de 40 kilometres) de la faille d'Enriquillo. Avec Port-au-Prince pour centre, les régions et villes situées dans un cercle de rayon d'à peu près 60 kilomètres furent furieusement touchées: destruction physique massive de Port-au-Prince, de Léogane, de Jacmel, de Petit-Goave et de Grand-Goave etc… accompagnée de plus de 200,000 morts et 250,000 blessés .
La reconstruction de la Capitale et de ces autres villes prendra plusieurs années. Suffisamment de temps, peut-être, pour les Haitiens et leurs dirigeants d'apprendre et de digérer une leçon importante: les tremblements de Terre se produisent en Haiti et la probabilité d'occurrence d'un autre aussi majeur que celui du 12 janvier 2010 ne sera jamais Zéro(0). Ce qui signifie qu'il peut se produire demain ou dans un autre siècle ou dans mille ans. Haiti doit commencer déja à se préparer pour cette éventualité et cette reconstruction doit nécessairement refléter cette leçon.
Pourquoi ce séisme a-t-il été aussi catastrophique et aussi meurtrier?. Pourquoi tant d'édifices ont-ils été détruits ou endommagés?
Première raison: l'Ampleur du tremblement
A cause de sa magnitude et sa proximité de Port-au-Prince (son épicentre était à peu près à 15 km de la Capitale) et d'autres villes avoisinantes, il a causé de très fortes vibrations et secousses - pendant une interminable demie-minute. S'il faut croire certains physiciens-géologues, ces secousses ont généré une quantité d'énergie supérieure à celle libérée par la bombe atomique d'Hiroshima, au Japon en 1945.
Deuxième raison: Absence de Standards et de Normes dans les constructions
Il est impossible de prédire quand un séisme se produira et encore moins controler ses effets. Cependant, l'absence totale de standards et de normes - normes antiséismiques - a résulté dans des édifices mal concus et contruits. Ils n'ont offert aucune résistance aux puissantes secousses du tremblement. En Haiti où il n'y a virtuellemnt pas de bois de construction, les maisons sont en bloc de béton et leurs ossatures, le plus souvent, ne sont pas adéquatement renforcées.
"La plupart de ces maisons - affirment certains experts en construction - n'ont qu'une armature en béton armé et rien en matière de renforcement séismique. En fait, en scrutant les photos de certains batiments effondrés de plusieurs étages, on peut réaliser que des colonnes plutôt minces soutiennent des dalles de béton très lourdes. Le contenu en acier de ces armatures est minime. "
Ce genre de construction peut-être approprié pour les régions non sujettes aux tremblements de terre où les structures sont concues pour supporter seulement des forces verticales telles celles causées par le poids des matériaux de construction. Cependant les tremblements de terre secouent ces mêmes structures horizontalement aussi. Les colonnes minces qui ne disposaient pas de la capacité de plier un petit peu se sont vite écroulées écrasant la plupart des maisons et transformant Port-au-Prince et d'autres villes en une vision apocalyptique de béton.
"Des colonnes plus fortes auraient, s'il faut croire certains ingénieurs en construction, probablement résisté aux assauts des forces séismiques si ells étaient proprement connectées aux poutres ou dalles (planchers) par des barres d'acier supplémentaires allant des colonnnes aux poutres- ce qui aurait permis un transfert continu des forces d'un élément d'une structure à un autre".
Lorsque cette absence de Normes au niveau de la construction des édifices, est accompagnée d'une absence des règlements de Zonage, il en résulte des constructions chaotiques, des batiments fragiles et des bidonvilles tous très vulnérables à certaines catastrophes naturelles. Port-au-Prince, avant ce tremblement de terre, était dangereusement surpeuplée de "maisons ou baraques" de fortune construites n'importe où ( sur les flancs des collines escarpées et dénudées entourant la ville, dans les ravines ou les lits secs de cours d'eau etc… ) - ou n'importe comment (en blocs de béton faits avec du ciment pauvrement mélangé à du sable de mauvaise qualité); en général, avec des matériaux de construction qui laissent beaucoup à désirer. Cette situation a rendu ce séisme beaucoup plus meurtrier qu'il l'aurait été s'il avait frappé une région plus robuste et des villes dotées de maisons mieux construites, moins fragiles ou vulnérables. Le séisme de 12 janvier 2010 n'est pas exceptionnel. Celui de 1989 à San Francisco était de magnitude comparable et pourtant il n'a tué que 63 personnes. Pierre Vilote, un physician-géologue, articula précisément le problème en déclarant : " Si la secousse a été aussi dévastatrice, c'est parce qu'elle a frappé un pays d'une très grande vulnérabilité- vulnérabilité dans ses infrastructures, ses constructions et ses moyens de secours." Il ne serait pas insensé de conclure qu'un tremblement de terre de magnitude beaucoup plus faible aurait, probablement, infligé des domages aussi considérables.
Reconstruire Port-au-Prince et Haiti sera un projet couteux et de grande envergure. Cependant, avant même de commencer cette reconstruction, il sera nécessaire d'avoir en place un gouvernement fonctionnel et visionaire capable de fixer les paramètres de la nouvelle Port-au-Prince, de la nouvelle Haiti et à même de gérer et superviser cette lourde tache.
Cette reconstruction doit nécessairement inclure la participation de nombreux architectes et ingénieurs à qui il incombera de concevoir l'Haiti de demain. Ils devront préconiser une transformation physique graduelle, profonde et bien pensée du pays. Une tache qui exigera, peut-être une architecture nouvelle. Parce que il faut penser à diminuer considérablement l'impact de désastres de la sorte à l'avenir.
Dans ce contexte, Haiti doit développer un système de Zonage adéquat et adopter un Code de Construction avec des éléments paraséismiques. Il est question de ne pas batir n'importe où avec du béton, de l'acier ou d'autres matériaux de mauvaise qualité.
Un système de Zonage servira à identifier et dresser une carte des zones de hazards séismiques et des régions propices aux éboulements ( flancs des mornes et collines, ravines, lits de cours d'eau etc…) et à interdire toute construction d'édifices habitables dans ces zones fragiles. Le Code de construction doit être moderne avec des standards internationaux qui permettront non seulement de réduire les risques d'effondrement des maisons mais aussi contribueront énormément à l'érection de l'Haiti du futur. Sa capitale et ses autres villes seront dorénavant dotées d'édifices robustement construits capable de résister aux effets des tremblements de terre les plus dévastateurs ou d'autres désastres naturels.
Les standards du Code International de Construction des Edifices sont des plus adéquats et peuvent être adoptés sans difficulté. On n'a pas besoin de "réinventer la roue".
Cependant l'adoption d'un système de Zonage et d'un Code de Construction se révèleront des exercices plutôt futiles si les architectes, ingénieurs et techniciens Haitiens de la construction ne reçoivent pas une formation technique et éthique adéquate et si un Organisme d'Implémentation puissant n'est pas crée. Sa tache sera d' assurer, d'une façon ou d'une autre, le respect total des Normes et Standards fixés.
Les autres raisons
Surpeuplement urbain/Pauvreté
CNN nous a montré les images poignantes de ces multitudes de gens: hommes, femmes et enfants vivant à fleur des rues, terrifiés par les répliques continuelle et angoissés par l'incertitude… tant de femmes qui racontent qu'elles ont perdu un, deux et même trois enfants des fois et qui se demandent, les larmes aux yeux, comment elles vont faire pour nourrir les deux ou trois autres qui ont survécu…
Pendant les 30 dernières années, il est estimé que plus de 70,000 Haitiens ont laissé les Provinces où dominent le chomage et la pauvreté pour s'établir à Port-au-Prince. La population de la Capitale est passée de plus de 700,000 en 1982 à plus de 3 millions avant le séisme. Ces gens qui fuyaient les conditions de vie parfois désespérées de leurs régions d'origine se sont retrouvées dans une Port-au-Prince incapable de leur offrir mieux. Pas de travail, pas de logements adéquats, pas de soins sanitaires etc… La grande majorité d'entre eux vivaient entassés comme des sardines dans de frêles maisons généralement mal construites sur les flancs de collines déboisées et instables. Des dizaines de milliers d'entre eux ont succombé sous les décombres de ces " véritables maisons de fortune" pendant le séisme.
Ce qui me fait penser à cette assertion du Professeur Mutter de l'Université de Colombia: "Ce ne sont pas les tremblements de terre qui tuent, ce sont généralement les maisons pauvrement construites". Ces maisons ont été construites ainsi à Port-au-Prince, à Jacmel, ou à Petit-Goave etc… parce que les gens sont pauvres et ne pouvaient se permettre que des matériaux de construction inadéquats ou des contremaitres non qualifiés ou sans scrupules. Les nombreuses morts ensevelies sous ces maisons aplaties sont victimes et du tremblement de terre et de cette pauvreté.
La reconstruction d'Haiti ne peut pas se faire sans l'éradication de ces fléaux que constituent le surpeuplement (urbain et rural) et l'une de ses séquelles, la pauvreté qui force 80% des habitants ( plus de 7 millions de gens) à survivre avec moins de $2 par jour. Une Haiti moins peuplée et moins pauvre sera une Haiti plus sécurisée.
Défaillance de L'Etat Haitien et de son système de secours
La lenteur avec laquelle l'Etat Haitien et le système de secours ont réagi à cet évènement cataclysmique a été l'objet de pas mal de critiques et des `reporters' internationaux et des Haitiens en général. En effet, des premiers secouristes (policiers, sapeur-pompiers, infirmiers et ambulanciers, quelques simples brancardiers etc…) qui pourraient sauver des vies immédiatement après le séisme ont été invisibles. Nous avons tous été témoins du spectacle de certains survivants courant à pieds vers l'Hôpital Général - l'un des rares hôpitaux qui n'ont pas été détruits - avec, dans les bras ou sur les épaules ou sur le dos, des blessés ...Combien écoeurant et frustrant d'apprendre que cet hopital, le plus grand de la Capitale, n'a pas pu sauver la vie de ces blessés parce qu'il ne disposait pas d'antibiotiques ou de quelques autres simples médicaments ou équipements! Des morts que Anderson Cooper de CNN et d'autres ont justement qualifié de `mort stupide' (stupid death).
Nous avons vu des survivants couverts de poussière et de sang essayant, avec leur mains nues, de se frayer un passage sous des montagnes de béton aux fins d'atteindre un parent, un ami et même un étranger qui criait "au secours".
Autant d'actes de courage et d'humanité qui resteront à jamais gravés dans les mémoires et qui ont contrebalancé l'indifférence du Gouvernement et au niveau des premiers secours et dans l'effort subséquent de soulagement des sinistrés. L'absence apparente d'un minimum de compassion pour un peuple affamé et sans abris - des millions d'enfants, de femmes et d'hommes réfugiés dans leur propre pays - défie la compréhension et la décence, même dans cette société qui n'a jamais valorisé les vies de la grande majorité d'Haitiens. Cette société qui n'a pas été outragée quand un gendarme a abattu un citoyen affamé qui s'était accaparé d'un sac de riz d'un super marché effondré.
L'exode de Port-au-Prince vers les villes et campagnes a commencé par mer, terre et même à pieds- prélude, peut-être, de la décentralization tant souhaitée de la Capitale? Voilà une excellente opportunité pour l'Etat Haitien de se racheter en essayant, par tous les moyens, d'encadrer les nouveaux-venus et de faciliter leur participation active dans le développement du pays.
Pour construire l'Haiti nouvelle et moderne il est impératif de changer cette culture qui s'est toujours foutue pas mal de la qualité de la vie et du bien-être relatif de la grande majorité des Haitiens. Cela s'accomplira en dotant Port-au-Prince et Haitie en général de l'infrastructure qui "valorisera" la vie de tout un chacun .
Michel Legagneur est un physicien spécialisé en médecine nucléaire
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